L’application des connaissances dans le domaine psychosocial

Depuis une dizaine d'années, on observe une mobilisation pour accroître l’application des connaissances issues de la recherche dans le domaine de l’intervention psychosociale. À titre d’exemple, le réseau des centres jeunesse du Québec a consacré d’importants investissements financiers et organisationnels afin d'implanter des programmes et des pratiques fondés sur l’utilisation des connaissances scientifiques (Chagnon, Pouliot, Malo, Gervais, et Pigeon, 2010; Turcotte, Lamonde, et Beaudoin, 2009; Trocmé, Esposito, Laurendeau, Thomson, et Milne, 2009). Dans le milieu de l’éducation, une importance accrue est également accordée par les chercheurs et les écoles pour que les connaissances scientifiques produites soient davantage utilisées par les enseignants et leurs gestionnaires (Abrami, Lysenko, Janosz, Bernard, et Dagenais, 2010; Tardif et Zourhlal, 2005).

Cette mobilisation pour une meilleure utilisation des connaissances issues de la recherche se manifeste aussi au sein des organismes subventionnaires. Les investissements faits par le Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (FQRSC) et le Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH) afin de favoriser l’application des connaissances par le biais de divers programmes de bourses et de subventions sont illustrent bien cette mobilisation.

Toutefois, malgré la mobilisation croissante des milieux de recherche, d’intervention et des organismes subventionnaires, la compréhension du processus et de la retombée de l’application des connaissances dans le domaine psychosocial demeure limitée. En effet, on ne dispose pas, à ce jour, d’un modèle théorique valide en ce domaine qui fasse consensus afin de guider les actions visant à accroître l’application des connaissances (Chagnon, Houle, Daigle, Mishara, et Bardon, 2008; Nutley, Walter, et Davies, 2007). Plusieurs auteurs questionnent l’applicabilité des modèles d’AC développés dans les domaines médicaux et infirmiers et expriment le besoin de se doter d’une vision des éléments (déterminants, stratégies et retombées) qui soit propre aux sciences humaines, sociales, arts et lettres (Berthelette et al., 2008; Chagnon et Malo, 2006). Par ailleurs, on connaît encore mal les moyens les plus efficaces à mettre en place afin de favoriser le processus d’application des connaissances et l’atteinte de retombées dans ces secteurs. Les structures de recherche en partenariat sont un des moyens utilisés. Ces structures mettent à profit des échanges continus entre chercheurs et partenaires de la pratique et sont de plus en plus valorisées au sein des institutions et par les organismes subventionnaires (Barrington Research Group, 2005; Tribble et al., 2008). Bien que ces partenariats semblent engendrer des bénéfices tant pour les chercheurs que pour leurs partenaires de la pratique, peu d’études au sein du secteur psychosocial ont examiné le processus d’application des connaissances, ses déterminants et ses retombées dans le contexte spécifique de structures de recherche en partenariat. L’état de la connaissance actuelle sur ces questions limite grandement le choix des meilleures stratégies afin de soutenir la retombée de la recherche dans ce secteur.